Les évangiles parlent des « frères » de Jésus, qui accompagnent par exemple sa « mère » en Marc 3, 31-35. Il est donc légitime de se demander si Jésus avait effectivement des frères et sœurs.
La Bible ne dit pas grand-chose de Marie, la mère de Jésus. Elle disparaît très vite et ne fait que quelques apparitions ponctuelles. On ne sait donc presque rien des enfants qu'elle a pu avoir, si ce n'est que le texte biblique fait justement allusion aux frères de Jésus.
Or, les termes désignant des liens familiaux (frère, père…) sont parfois utilisés pour désigner d'autres types de liens, par exemple diplomatiques, idéologiques ou spirituels. C'est déjà le cas à l'époque de la Bible, où un roi peut par exemple écrire à un autre en l'appelant son « frère », ce qui indique qu'ils sont d'un rang égal d'un point de vue diplomatique. Ainsi, lorsque Jésus dit après sa résurrection d'annoncer à ses « frères » qu'il monte vers le Père, il désigne probablement ses compagnons (Jean 20, 17).
Il faut donc, à chaque occurrence de ce terme, se demander s'il est à prendre au sens biologique, ou s'il désigne un autre type de lien relationnel. Justement, le passage de Marc 3 emploie les deux sens du terme : d'abord au sens littéral (v. 31-32), puis au sens spirituel (v. 33-35). Jésus indique là que la filiation qui compte le plus, c'est celle qui est spirituelle. Ce passage semble donc confirmer que Jésus avait effectivement des frères, mais que ces liens biologiques étaient moins importants à ses yeux qu'un attachement spirituel.
Un autre passage nous donne quelques-uns des noms de la famille biologique de Jésus : en Marc 6, 3, on précise que sa mère s'appelle « Marie », son père « Joseph », ses frères « Jacques », « Josès », « Jude » et « Simon ». On mentionne aussi ses sœurs, sans les nommer.
L'historien juif Flavius Josèphe, vers la fin du Iᵉʳ siècle de notre ère, mentionne également « le frère de Jésus, appelé Christ, dont le nom était Jacques » (Antiquités, XX, 200). Cela coïncide avec l'un des frères de Jésus mentionnés ci-dessus. Flavius Josèphe nous apprend en outre que le grand prêtre de Jérusalem a fait comparaître ce Jacques devant le sanhédrin, qui l'a condamné à mort.
Au final, même si l'historicité de ces personnages demeure incertaine, les traditions les plus anciennes semblent concordantes ; Jésus avait bien des frères et sœurs, ce qui n'est finalement guère surprenant. La polémique enflera plus tard, lorsque des traditions se développeront autour de Marie pour en faire une vierge perpétuelle, c'est-à-dire qu'elle aurait non seulement été vierge à la naissance de Jésus, mais qu'elle le serait restée par la suite, jusqu'à la fin de sa vie. C'est alors qu'il a fallu, par cohérence, présenter les frères de Jésus comme ses demi-frères ou ses cousins.
Le problème, au fond, est la question de la virginité, les rapports sexuels étant perçus dans certains milieux religieux comme une forme d'impureté. C'est la même logique qui a conduit à exiger la chasteté du clergé, puis son célibat. Il s'agit donc aujourd'hui encore d'un sujet très sensible, et c'est pourquoi on parle peu des frères de Jésus.
On Wed, Feb 3, 2021 at 2:42 PM
Bonjour,
Jésus a-t-il eu des demi-frères
et sœurs issus de la même mère ou bien est-il le fils unique de
Marie ? A-t-on de nouveaux éléments pour savoir s'il s'agit
de frères ou de cousins, ou les enfants de Joseph seulement ?
MERCI
Bonjour,
merci pour vos connaissances qui nous éclairent, mais en relisant
votre commentaire un détail me surprend. Le texte de l’évangile
dit que Marie était une vierge ou une jeune femme fiancée à Joseph,
quand elle a conçu l’enfant Jésus.. Chez les juifs la sexualité
n’ était pas mauvaise, mais interdite en dehors de l’ alliance du mariage.
La virginité de Marie a pour cela, à mon avis, un sens théologique profond.
Considérer que la virginité de Marie est allégorique ou symbolique
(courant actuel) pose un sérieux problème sur tous les miracles du
Saint- Esprit,(de la naissance, en passant par les guérisons jusqu’à
la résurrection.!). Je suis sincèrement perplexe. Que reste-il, une belle morale ?
Par contre la virginité perpétuelle de Marie vient bien de la tradition de l’église.
Merci encore pour votre écoute.
Le grec utilise deux mots distincts pour désigner le premier fils d’une femme :
– « monogénês » pour préciser que le fils est resté unique,
– « prôtotokon » pour préciser que le fils est le premier-né, c’est-à-dire l’aîné des autres.
Dans l’évangile de Luc c’est le mot prôtotokon (aîné des autres) qui est utilisé, indiquant ainsi sans ambiguïté que Marie eut d’autres enfants que Jésus. D’ailleurs, en 380, Helvidius, Jovinien et Bonose, affirmaient que Marie avait eu d’autres enfants après Jésus.