Dans le Nouveau Testament, et plus précisément dans l’Apocalypse de Jean, on peut lire : « Je suis l’Alpha et l’Oméga, dit le Seigneur Dieu » (Apocalypse 1,8). On retrouve la même expression à la fin du livre (Apocalypse 21,6 et 22,13). Ces versets ont été écrits en grec, or le terme “alpha” désigne la première lettre de l'alphabet grec, et “oméga”, la dernière. Il faudrait donc traduire : « Je suis le A et le Z ». Cette expression désigne le fait que Dieu est le premier et le dernier, dans une dimension temporelle, hiérarchique, relationnelle, etc. C'est lui qui, au commencement, a créé le monde, et c'est lui qui, à la fin, jugera les bons et les méchants.
Cette notion existe déjà dans le judaïsme qui a vu naître le christianisme. On peut donc tout-à-fait imaginer que Dieu soit qualifié d'Alpha et d'Oméga dans des manuscrits grecs du tournant de notre ère, mais ce n'est pas le cas en l'espèce. Le manuscrit de Qumrân auquel vous faites allusion, 4Q120 (4QpapLXXLevᵇ), est un rouleau d'une version grecque du Lévitique. Le nom propre de Dieu, le fameux tétragramme Yhwh, y est transcrit ΙΑΩ en grec c'est-à-dire « Iaô ». Cette transcription concorde avec le diminutif Yhw, attesté dans la Bible hébraïque comme composante de certains noms propres où il est vocalisé « Yâhou » ou « Yehô ». On trouve également le dieu Yhw dans des inscriptions araméennes plusieurs siècles avant notre ère.
Ainsi, la présence des deux lettres alpha et oméga, côte à côte, dans ce manuscrit de Qumrân, n'a rien à voir avec l'expression “l’Alpha et l’Oméga », qui serait écrite en toutes lettres. C'est comme si on prenait le mot français « raz », qu'on enlevait la première lettre de sorte à n'avoir que les lettres A et Z côte à côte et qu'on en déduise que Dieu est “le A et le Z”. Ce genre d'interprétation est tout-à-fait possible a posteriori mais cela ne veut pas dire que c'était l'intention de l'auteur.
En fin de compte, le plus intéressant dans cette transcription grecque à Qumrân, c'est qu'elle montre que, contrairement à une tradition juive qui interdit la prononciation du tétragramme, ceui-ci était encore prononcé dans certains milieux juifs, notamment de langue grecque, et plus précisément qu'il était prononcé Iaô.
On Thu, Oct 19, 2023 at 11:33 AM
Michael, bonjour.
J'ai une question un peu pointue et je ne sais pas à qui la poser …
Je trouve dans un article de la Revue réformée signé par Ron BERGEY
(Janvier 2015) que dans un manuscrit grec du Levitique le nom de Dieu
aurait été remplacé par AW (alpha omega). La note 2 indique sans doute
le numéro du manuscrit qui serait 4QpapLevb.
Confirmez vous ce fait ? Très étrange car cet alpha oméga semble
venir de l'apocalypse !
Mon problème est que je n'ai trouvé nulle part ce AW (qui semble être
une sorte de nomination sacra). J'aimerais le voir … j'ai trouvé
qqchose d'approchant mais il comprend trois caractères et non deux.
Je vous remercie d'avance.